Namnam
Il y a 1 mois et 1 semaine
Plic, ploc, plic… ploc.
Il fait étonnamment doux, ce matin. Les flocons tombent en silence, lourds, gorgés d’eau, s’écrasant en spirales précipitées. Ils chutent vite, presque pressés. Les rares stalactites, sculptées par le gel, s’érodent goutte à goutte, se muant en surfaces luisantes où l’eau s’écoule avec lenteur, se détache en perles claires, et vient nourrir la flaque grandissante à leurs pieds.
Plic, ploc.
Il y a quelque chose d’hypnotique, de poétique dans leur chute. À peine nées, les gouttes sont arrachées à leur mère de glace pour choir, encore et encore, dans un ballet effréné. Jusqu’à ce que le froid revienne les figer à nouveau.
Ploc —« Demoiselle Isolde. »
Qu’est-ce que cela ferait, d’être aussi insignifiante qu’une simple goutte d’eau ? Passer de l’état de glace — majestueuse, figée dans sa beauté — à celui de l’eau, insaisissable, essentielle…? Disparaît-on vraiment lorsqu’on est absorbée par la terre ou avalée par des lèvres assoiffées ? Ou bien cela marque-t-il le commencement d’un autre voyage…
« Peut-être… » se murmure-t-elle en silence.
« Demoiselle Isolde ! »
Quelle douce délivrance ce serait, de se dissoudre ainsi… Que plus personne ne puisse exiger quoi que ce soit. Que le quotidien se transforme en un vaste océan de néant… N’est-ce pas préférable à—
« ISOLDE ! »
La douleur fut fulgurante, tant la gifle fut sèche. Le visage de la jeune femme fut violemment projeté sur le côté, lui coupant le souffle. Le monde sembla se figer. Elle n’entendait plus le bruit des gouttes, mais seulement l’écho cinglant de la claque, résonnant dans ses oreilles pointues. Sa peau, rosie par l’impact, se couvrit bientôt de picotements acérés comme des aiguilles, prolongeant l’élancement, ravivant l’humiliation.
Isolde — jeune femme aux portes de la vingtaine — leva lentement son regard vers celle qui l’avait frappée. Impossible de croiser ses prunelles : le voile épais de la Matriarche occultait tout, masquant jusqu’à la moindre émotion. Un masque d’ombre, inexpressif. Ni colère, ni compassion, ni satisfaction. Rien que le vide.
—
« Vous n’êtes pas attentive, demoiselle Isolde. Est-ce une tentative de défiance ? » siffla d’une voix glaciale la Matriarche.
—
« …Je ne me permettrais jamais un tel affront, Matriarche. Aucune excuse ne saurait le justifier. »
Répondit-elle d’un ton tout aussi tranchant, inclinant son buste en signe d’excuse devant cette spectre autoritaire. Le voile noir se redressa alors, comme animé d’un orgueil muet, et le menton de la Matriarche s’éleva dans un geste austère. Isolde sentit remonter cette peur ancienne, aiguë, tapie dans ses entrailles. Une peur rythmée par des années de scènes semblables, où la douleur et le froid tenaient lieu de compagnons constants. Ainsi allait la vie de celles qui, au sein des Vespérine, n’étaient pas l’Élue attendue.
—
« Bien. Dois-je vous répéter une énième fois qu’en tant que cinquième fille de feu madame, vous n’êtes pas autorisée à vous approcher du couvent ? »
Isolde plissa le nez. Ce lieu avait toujours eu quelque chose d’étrange. L’air y était plus froid, plus acéré que dans n’importe quelle aile du bastion. Et surtout… toutes celles qu’elle avait vues y entrer, elle ne les avait jamais revues sortir.
—
« Je voulais rendre visite à ma cousine, Anastasie. Pourquoi cela serait-il interdit ? »
—
« Les impuissantes ont choisi de tourner le dos à la lumière des Vespérine. Dans leur obscurité, elles servent Halone. »
—
« Mais Anastasie n’a jamais vou— »
—
« Cessez. »
La Matriarche leva la main, son geste vif. À son poignet, quelques bracelets tintèrent d’un bruit métallique, aigu et tranchant. Le regard d’Isolde, animé un instant par l’émotion, se fit soudain plus calme, abdiquant.
—
« Fort bien, madame. »
—
« Il semble que vous ayez trop de temps libre pour nourrir pareilles distractions. C’est pourquoi votre apprentissage martial commencera dès aujourd’hui. »
—
« … »
—
« Dame Elora, approchez. »
La Matriarche pivota, et Isolde découvrit une silhouette massive s’avancer à pas mesurés. Une femme à la carrure impressionnante, aux yeux d’un noir d’encre, et à la chevelure grise tombant sur une expression étonnement sereine, marquée par les cicatrices. L’acier de son armure crissait à chacun de ses pas. Lorsqu’elle s’arrêta devant la jeune fille, elle s’inclina profondément.
—
« Chevalier Elora Hultemont, à votre service, mademoiselle. »
Isolde l’observa, méfiante, mais son regard trahissait une curiosité tenace.
Serait-ce le début d’un nouveau voyage ?
[quote]Namnam
[b][url=https://zupimages.net/viewer.php?id=25/17/f4a8.png][img]https://zupimages.net/up/25/17/f4a8.png[/img][/url]Plic, ploc, plic… ploc.[/b]
Il fait étonnamment doux, ce matin. Les flocons tombent en silence, lourds, gorgés d’eau, s’écrasant en spirales précipitées. Ils chutent vite, presque pressés. Les rares stalactites, sculptées par le gel, s’érodent goutte à goutte, se muant en surfaces luisantes où l’eau s’écoule avec lenteur, se détache en perles claires, et vient nourrir la flaque grandissante à leurs pieds.
[b]Plic, ploc.[/b]
Il y a quelque chose d’hypnotique, de poétique dans leur chute. À peine nées, les gouttes sont arrachées à leur mère de glace pour choir, encore et encore, dans un ballet effréné. Jusqu’à ce que le froid revienne les figer à nouveau.
[b]Ploc —[/b][i]« Demoiselle Isolde. »[/i]
Qu’est-ce que cela ferait, d’être aussi insignifiante qu’une simple goutte d’eau ? Passer de l’état de glace — majestueuse, figée dans sa beauté — à celui de l’eau, insaisissable, essentielle…? Disparaît-on vraiment lorsqu’on est absorbée par la terre ou avalée par des lèvres assoiffées ? Ou bien cela marque-t-il le commencement d’un autre voyage… [i]« Peut-être… »[/i] se murmure-t-elle en silence.
[i]« Demoiselle Isolde ! »[/i]
Quelle douce délivrance ce serait, de se dissoudre ainsi… Que plus personne ne puisse exiger quoi que ce soit. Que le quotidien se transforme en un vaste océan de néant… N’est-ce pas préférable à—
[b]« ISOLDE ! »[/b]
La douleur fut fulgurante, tant la gifle fut sèche. Le visage de la jeune femme fut violemment projeté sur le côté, lui coupant le souffle. Le monde sembla se figer. Elle n’entendait plus le bruit des gouttes, mais seulement l’écho cinglant de la claque, résonnant dans ses oreilles pointues. Sa peau, rosie par l’impact, se couvrit bientôt de picotements acérés comme des aiguilles, prolongeant l’élancement, ravivant l’humiliation.
Isolde — jeune femme aux portes de la vingtaine — leva lentement son regard vers celle qui l’avait frappée. Impossible de croiser ses prunelles : le voile épais de la Matriarche occultait tout, masquant jusqu’à la moindre émotion. Un masque d’ombre, inexpressif. Ni colère, ni compassion, ni satisfaction. Rien que le vide.
— [i]« Vous n’êtes pas attentive, demoiselle Isolde. Est-ce une tentative de défiance ? »[/i] siffla d’une voix glaciale la Matriarche.
— [i]« …Je ne me permettrais jamais un tel affront, Matriarche. Aucune excuse ne saurait le justifier. »[/i]
Répondit-elle d’un ton tout aussi tranchant, inclinant son buste en signe d’excuse devant cette spectre autoritaire. Le voile noir se redressa alors, comme animé d’un orgueil muet, et le menton de la Matriarche s’éleva dans un geste austère. Isolde sentit remonter cette peur ancienne, aiguë, tapie dans ses entrailles. Une peur rythmée par des années de scènes semblables, où la douleur et le froid tenaient lieu de compagnons constants. Ainsi allait la vie de celles qui, au sein des Vespérine, n’étaient pas l’Élue attendue.
— [i]« Bien. Dois-je vous répéter une énième fois qu’en tant que cinquième fille de feu madame, vous n’êtes pas autorisée à vous approcher du couvent ? »[/i]
Isolde plissa le nez. Ce lieu avait toujours eu quelque chose d’étrange. L’air y était plus froid, plus acéré que dans n’importe quelle aile du bastion. Et surtout… toutes celles qu’elle avait vues y entrer, elle ne les avait jamais revues sortir.
— [i]« Je voulais rendre visite à ma cousine, Anastasie. Pourquoi cela serait-il interdit ? »[/i]
— [i]« Les impuissantes ont choisi de tourner le dos à la lumière des Vespérine. Dans leur obscurité, elles servent Halone. »[/i]
— [i]« Mais Anastasie n’a jamais vou— »[/i]
— [i]« Cessez. »[/i]
La Matriarche leva la main, son geste vif. À son poignet, quelques bracelets tintèrent d’un bruit métallique, aigu et tranchant. Le regard d’Isolde, animé un instant par l’émotion, se fit soudain plus calme, abdiquant.
— [i]« Fort bien, madame. »[/i]
— [i]« Il semble que vous ayez trop de temps libre pour nourrir pareilles distractions. C’est pourquoi votre apprentissage martial commencera dès aujourd’hui. »[/i]
— [i]« … »[/i]
— [i]« Dame Elora, approchez. »[/i]
La Matriarche pivota, et Isolde découvrit une silhouette massive s’avancer à pas mesurés. Une femme à la carrure impressionnante, aux yeux d’un noir d’encre, et à la chevelure grise tombant sur une expression étonnement sereine, marquée par les cicatrices. L’acier de son armure crissait à chacun de ses pas. Lorsqu’elle s’arrêta devant la jeune fille, elle s’inclina profondément.
— [i]« Chevalier Elora Hultemont, à votre service, mademoiselle. »[/i]
Isolde l’observa, méfiante, mais son regard trahissait une curiosité tenace.
[b]Serait-ce le début d’un nouveau voyage ?[/b][/quote]